Pour pouvoir vivre leurs envies sans se sentir jugées, ces femmes ont caché tout un pan de leur quotidien à leur entourage. Mener deux vies en une n’est pas toujours facile… Témoignages.
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Un conjoint et un amant, une épouse et une maîtresse attirée… Le plus souvent, on entend par « double vie » l’existence de deux vies sentimentales parallèles, et l’impossibilité de choisir entre l’une et l’autre. Mais pour certains, ces petits mensonges vont plus loin. Et si les histoires les plus fracassantes sont souvent l’apanage des hommes, il arrive aussi que des femmes cachent leurs vérités. Nous en avons rencontré trois. Sous le sceau de l’anonymat, elles ont accepté de nous raconter leur double vie.
Comédienne ou avocate ?
« Une double vie ? Même si c’est désormais derrière moi, je l’ai vécu pendant trois ans, lors de mes études. J’ai grandi dans une petite ville de Bourgogne, que j’ai quitté après avoir décroché mon bac. Mon envie, à ce moment-là, était de suivre des cours de théâtre et de chant. J’ai toujours rêvé d’être comédienne, de jouer dans des comédies musicales notamment. Hélas, mes parents n’ont jamais compris : ils ont vu ça comme une lubie. Ils ont refusé que je m’inscrive dans une de ces écoles. Je devais faire des études sérieuses et, à leurs yeux, le théâtre ne l’était pas ! Donc, je suis partie à Lyon, où je suis inscrit à la fac. J’ai commencé des études de droit. Cela m’a si peu passionnée que j’ai dû les suivre pendant… à peine un trimestre ! Sans rien dire à personne, j’ai cherché un petit boulot. Pendant que mes parents me croyaient en cours, j’étais vendeuse dans une boutique de vêtements. À mi-temps. Parce que, l’autre moitié du temps, je le passe dans un petit cours de théâtre où je me régalais. Comme ils ne suivaient pas mes résultats de près, j’ai pu faire durer la supercherie. Jusqu’à ce que mentir devienne compliqué. Forcément, un jour, ils m’ont demandé : « Alors, ce diplôme, c’est pour quand ? Tu vas bientôt devenir avocate ? Le jour où j’ai été engagé dans une compagnie de théâtre et que je m’apprête à partir pour ma première tournée, j’ai enfin eu le courage de tout leur avouer. Je pense que je leur aurais annoncé être atteint d’une terrible maladie qu’ils ne l’auraient pas pris plus mal ! Dans un sens, je peux les comprendre ; je les ai trompés pendant si longtemps… Aujourd’hui, il reste une trace de ce mensonge. Ils voient que je gagne ma vie de passion ; cela pourrait suffire à leur bonheur, mais non ! Je ne serai jamais avocate, et ils n’en décolèrent pas ! De ce fait, ils ont pris leurs distances avec moi. Je ne les vois plus beaucoup. Je regrette vraiment de ne pas avoir joué des cartes sur table dès le départ. Mais bon… On commet tous les erreurs de jeunesse, non ? » Suria, 27 ans
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Croyante pour les uns, athée pour les autres
« Je ne suis pas du tout croyante, mais je suis née dans une famille très religieuse. Plus jeune, il n’était pas question que j’exprime le moindre doute quant à ma foi. Je n’avais pas mon mot à dire ! Quand je me suis mariée, pas de chance : je suis tombée amoureuse d’un homme lui aussi très religieux, et le schéma s’est reproduit. Mon mari ne comprend pas une seconde que je puisse être athée ! Vous me direz que je n’ai qu’à m’affirmer, et que j’aurais dû le faire bien plus tôt… Hélas, j’avoue en avoir toujours été incapable. Ce doit être le poids de mon éducation qui fait cela. Dès que l’idée me traverse l’esprit, je culpabilise ; je me mets même à douter de moi. Et si j’étais plus croyante que je ne le prétendais ? Et si, au fond, j’étais resté l’ado rebelle que j’ai un peu été ? Et puis ça passe… En fait, je ne me sens moi-même que dans ma vie sociale. À mes collègues et mes amies, je ne cache rien. Avec eux, je n’en fais qu’à ma tête. Par exemple, chez moi je fais le ramadan mais, à l’extérieur, je déjeune avec des copines ou sors prendre un verre entre filles. Ni mes parents ni mon mari ne se doutent de quoi que ce soit. Je vis ma vie, voilà tout ! » Amina, 42 ans
Infidèle à Paris, épouse exemplaire à Rabat
« Dire que j’ai une double vie est un euphémisme ! L’une au Maroc, où je suis née, l’autre en France, où je viens presque chaque mois. J’ai grandi à Rabat, dans une famille très bourgeoise où le paraître et le statut social étaient essentiels. Depuis toujours, mes parents sont assez proches de la famille royale. À la maison, c’était la valse des politiciens, des hommes d’affaires, des artistes célèbres… Bref, ma jeunesse s’est déroulée dans l’aisance totale. Et, pour ma part, dans une sagesse exemplaire. Mes parents étaient très stricts et ne me laissaient guère le loisir de montrer quelque originalité que ce soit. À l’école, même choisi : j’étais scolarisée dans un pensionnat en Angleterre où tout devait filer droit ! Au fond de moi, pourtant, j’avais des envies à l’opposé ! Par exemple, je rêvais de passer des nuits en boîte, à Paris, à Londres ou sur la Côte d’Azur. D’aller au Festival de Cannes : ce que l’on racontait dans les journaux des fêtes qui s’y déroulaient me faisait fantasmer… En fait, je voulais m’encanailler, me sentir libre, sans peur d’être jugé. Au lieu de ça, lorsque j’ai eu l’âge de moi marier, mes parents se sont mis en chasse des plus beaux partis pour moi. À 26 ans, j’ai fini par céder. Depuis, je suis l’épouse d’un homme d’affaires attentionné mais souvent parti en voyage. Ma seule condition quand j’ai accepté de l’épouser : ne pas avoir d’enfant. Une vie de famille, très peu pour moi ! Je n’ai jamais eu envie de reproduire le schéma de mes parents. Il fallait que je respire, que je me sente sans entraves ni obligations dans ma vie d’adulte ! Heureusement, mon mari n’y locataire pas trop non plus, la question n’a pas fait débat. Ce qu’il n’a jamais su, en revanche, c’est ce besoin de liberté qui m’anime. C’est grâce à mon job que j’ai fini par trouver cette respiration, depuis une bonne dizaine d’années. Je travaille dans le milieu de l’art contemporain, et cela me permet de venir très souvent en France. Alors, c’est ici que je me rattrape. À peine ai-je posé les pieds à Paris que le tourbillon commence. Tous les soirs, je sors boire un verre, deux, puis trois. Je danse comme une folle, je fume comme un pompier. Et j’avoue collectionner les amours d’une nuit ou deux. Un homme, une femme, peu m’importe. Au fil des années, j’ai découvert beaucoup de plaisirs que l’on dit interdits. Pour la première fois, je me sens en phase avec moi-même. À Rabat ? Personne ne dit évidemment. À Paris, sans plus. Ici, mes relations me connaissent généralement sous un autre prénom. Je préfère rester prudente. Même si je reconnais faire trop d’excès, j’ai le sentiment de vivre enfin ma jeunesse. Un jour, il faudra que je me calme mais, pour l’instant, je mène mes deux existences de front. C’est d’autant moins difficile que la géographie m’aide beaucoup à segmenter. En traversant la Méditerranée, c’est un peu comme si je changeais de masque… » Leïla, 36 ans
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