Accident, maladie, opération… Ces Gazelles ont frôlé la mort, et cet événement a changé leur regard sur la vie : leur épreuve leur a permis de renaître à elles-mêmes. Elles partagent leur expérience. Séquences émotions.
Ingrid, 35 ans. « J’ai eu 103 points de suture sur la moitié du visage »
« À 9 ans, j’ai eu un accident de voiture. Je partais en week-end chez une copine avec sa maman, et cette dernière a perdu le contrôle du véhicule. On a fait plusieurs tonneaux. Avant que les pompiers n’arrivent sur les lieux de l’accident, des personnes m’ont fait sortir de la voiture par la fenêtre, pensant bien faire. Elles ont eu un mauvais geste, et j’ai été blessée au visage. Je suis restée cinq heures au bloc, j’ai eu 103 points de suture sur la moitié du visage. Une dizaine de minutes avant l’accident, j’avais ressenti un violent mal de ventre. C’était viscéral, comme si je savais que quelque chose allait se passer. La maman de ma copine m’avait alors dit de retirer ma ceinture, pensant que c’était elle qui me comprimait. Heureusement, je n’ai pas été projetée en dehors du véhicule – si cela avait été le cas, je ne serais peut-être pas là aujourd’hui. Quand j’ai repris mes esprits, j’avais du sang partout. J’ai eu très peur. Il m’arrive encore aujourd’hui de faire aujourd’hui des crises d’angoisse. Les traces de mes blessures se voient moins, mais elles ont failli me mettre des barrières dans ma carrière : à 17 ans, j’ai voulu entamer un CAP esthétique, et j’ai essuyé plusieurs refus, dont celui de la responsable d’un institut qui m’a dit que mes cicatrices pouvaient être gênantes pour la clientèle. Sans patron, je ne pouvais m’inscrire en CAP ; j’ai donc fait des études de commerce. Et, à 21 ans, avec l’indemnisation perçue suite à mon accident, j’ai passé mon CAP esthétique dans une école privée. Puis j’ai obtenu un BTS esthétique-cosmétique. Tous les jours, je me dis que la vie est belle. Cette épreuve m’a servi : je n’ai pas peur d’oser, j’ai conscience que la vie peut s’arrêter brutalement. Aujourd’hui, je suis à la tête d’un centre de formation et de cinq instituts de beauté. Un travail d’introspection m’a beaucoup aidée ; j’ai lâché prise, quitté ma posture de victime, ce qui m’a amenée sur le chemin du pardon et de la guérison. »
Sonia, 39 ans. « J’ai fait une embolie pulmonaire bilatérale massive suivie d’un infarctus »
« En 2013, j’ai ressenti de fortes douleurs qui m’ont poussée à consulter. J’ai effectué des examens médicaux ; j’avais un problème à la vésicule biliaire. Je me suis fait opérer. Tout s’est bien passé, on m’a laissée rentrer à la maison avec du paracétamol. J’ai repris doucement ma vie. Et j’ai commencé à éprouver une détresse respiratoire, mes lèvres sont devenues bleues, j’avais une douleur dans la poitrine. J’ai contacté l’hôpital, mais on m’a dit que c’était normal… Le lendemain, il m’était impossible de faire deux mètres sans être essoufflée. On m’a alors accompagnée chez mon médecin généraliste. Il m’a dit que je faisais une embolie pulmonaire et que je devais me rendre aux urgences. Là, on m’a prise en charge, j’ai passé un scanner. Résultat : embolie pulmonaire bilatérale massive. J’ai perdu la capacité d’une partie de mon poumon droit. J’ai aussi fait un infarctus. En prenant le relais de mes poumons, qui avaient du mal à fonctionner, mon cœur avait grossi. J’ai été hospitalisée dix jours, avec prescription d’anticoagulant. J’ai perdu beaucoup de poids et de cheveux. Je me trouve extrêmement chanceuse, et je remercie Dieu tous les jours de m’avoir laissée en vie. Ma vision de la vie a beaucoup changé. Et, surtout, je me dis que si Dieu m’a laissé du temps, c’est pour l’employer positivement, et au service des autres. Je n’ai pas le droit de me plaindre. »
Alyssa, 30 ans. « J’ai survécu à une prééclampsie sévère »
« Je me suis mariée avec un pervers narcissique. J’ai appris que j’étais enceinte quand je me suis séparée. J’ai voulu lui donner une nouvelle chance pour notre enfant, mais les violences physiques ont repris. Sur le plan médical, ma grossesse se passait bien. Mais une nuit, au septième mois, j’ai ressenti de fortes contractions. À l’hôpital, la gynécologue m’a annoncé que mon bébé était décédé. Le choc. Le placenta s’était décollé, mon fils n’était plus oxygéné. Puis j’ai senti mon corps se déchirer. Je commençais à accoucher par voie basse. Des flaques de sang tombaient. On m’a emmenée en urgence pour une césarienne sous anesthésie générale. J’avais perdu 2,5 litres de sang, alors que le corps humain en contient environ 6. Mon pronostic vital était engagé. La solution envisagée pour faire cesser l’hémorragie était de me retirer l’utérus, mais il a pu, al hamdoulilah, être épargné de justesse. Mon bébé est mort-né à 14 h. Je me suis réveillée vers 19 h. J’ai failli y passer. Je suis restée hospitalisée un moment, avant de me faire chouchouter chez mes parents. De retour chez moi, les conflits avec mon conjoint ont repris. Une amie, me voyant en danger, m’a aidée à entamer les démarches de divorce, non sans mal. J’ai compris que la vie était trop incertaine pour rester sous l’emprise d’un pervers. Je me dis que mon bébé m’a sauvée. En partant, il m’a permis de me libérer une fois pour toutes de cet homme. Je crois qu’au fond de moi, je ne voulais pas d’un père comme lui pour mon enfant. J’ai commencé un nouveau départ, loin de ma ville d’origine, à l’étranger. Je me suis reconstruite petit à petit. J’ai trouvé un travail. J’ai rencontré un homme bienveillant. Il m’a redonné confiance en la vie. Aujourd’hui, je suis maman d’un petit garçon et heureuse de mon nouveau départ. Dieu m’a donné une seconde chance. La foi m’a beaucoup aidée. Sans elle, je me serais perdue. »
Sonia, 43 ans. « J’ai failli me noyer »
« Quand j’étais jeune, je passais tous mes étés au Maroc. L’année de mes 17 ans, avec mon oncle, ma tante et un ami de mon oncle, tous plus jeunes que moi, nous sommes allés à la plage. Par pudeur, je portais un short par-dessus mon maillot de bain pour me baigner. Nous nous apprêtions à rentrer. J’avais retiré mon short pour l’essorer dans l’eau. Pour rire, mon oncle l’a jeté au loin. Je suis alors allée le chercher à la nage. Au moment où j’allais revenir sur la plage, j’ai commencé à peiner. J’avais l’impression de ne pas avancer ; au contraire, je m’enfonçais. L’ami de mon oncle a essayé de me tirer. Et au moment où j’ai entendu le maître-nageur siffler, je me suis enfoncée dans l’eau. Au Maroc, dans la mer, il y a des petites tornades qui vous emportent. Le maître-nageur m’a récupérée. Quand je me suis réveillée, j’étais allongée sur la plage, avec du monde autour de moi. Lorsque nous sommes rentrés à la maison, ma grand-mère nous a accueillis en nous disant : “Racontez-moi, il s’est passé quelque chose.” Cette phrase nous a surpris. En fait, comme chaque vendredi, elle avait égorgé un lapin, et, ce jour-là, l’animal lui avait mordu le doigt – un mauvais présage, pour elle… À l’époque, je ne me suis pas rendu compte que j’aurais pu mourir. Ce n’était pas mon heure. Aujourd’hui, je suis maman de trois filles. Sur la plage, elles ne vont jamais très loin et, surtout, jamais sans moi… La vie ne tient vraiment qu’à un fil. »