Besoin d’ancrer à l’encre indélébile les événements de leur vie, leur passion, leur dévotion…Certaines bravent l’interdiction religieuse et se laissent tenter par les tatouages. Passion ou revendication d’un style, d’une identité, elles arborent ces inscriptions comme de véritables ornements.
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Le tatouage est illicite et le tatoueur ainsi que le tatoué sont tous deux maudits. Boukhari a rapporté que le Prophète (que la paix et le salut soient sur lui) a maudit les tatoueuses et les tatouées » est un hadith rapporté par Boukhari. Même si les jeunes filles et les femmes se faisaient tatouer différents symboles berbères sur le visage, les bras, les mains dans les pays du Maghreb, cette pratique est à présent considérée comme haram. En effet, l’Islam interdit toutes choses qui modifieraient l’aspect physique. Cependant, cela n’empêche pas certaines jeunes femmes d’aller à l’encontre des interdits religieux et du regard d’autrui afin de vivre leur passion DES SYMBOLES RELIGIEUX Si cela peut paraître paradoxal, Sana, 32 ans a choisi de se faire tatouer la « shahada » l’attestation de foi. « Je suis une fervente croyante. Je pratique ma religion comme il se doit. Je prie, je fais le Ramadan, je donne la zakat… mais cela ne m’empêche pas d’aimer les tatouages. Cette passion est née lorsque j’étais toute jeune. ? Si j’ai commencé avec les piercings, notamment sur le visage, je m’en suis vite lassée. J’ai vite voulu modifier mon corps d’une autre façon. Je voyais de beaux tatouages tribaux et j’ai eu envie d’en avoir un. Cependant, arborer un signe que je ne comprenais pas ne m’intéressait pas, je souhaitais une inscription qui ait du sens. J’ai décidé de me faire tatouer la « shahada ». Cette décision n’a pas été très bien accueillie par ma famille, qui avait jusque-là toléré mes piercings – ils savaient qu’ils ne laisseraient pas de grosses marques si je les enlevais. La communauté musulmane a encore des difficultés avec le tatouage, mais tant pis, j’ai appris à vivre avec ces regards inquisiteurs ».
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DES SIGNES QUI REPRÉSENTENT UN ÉVÉNEMENT MARQUANT
Pour retracer les événements marquants de leur existence, certaines personnes osent les graver sur leur peau à jamais. Fatiha, 45 ans, a toujours été passionnée par ce qu’elle nomme l’art du tatouage. De confession musulmane, elle a deux enfants de 19 ans et 17 ans qui ne sont pas forcément d’accord avec son choix, mais qui le respectent. « Bien que je sois musulmane, les interdits qui sont liés à l’Islam peuvent ne pas coïncider avec mes valeurs. Je traiterai directement avec Dieu. Mon premier déclic, celui qui m’a amené à pousser la porte d’un tatoueur, est survenu juste après ma séparation d’avec le père de mes enfants, à l’âge de 27 ans. J’ai demandé à la tatoueuse de réaliser moi-même le dessin – ce qui peut paraître surprenant –, et elle a accepté. Le dessin représentait des ronces et un mechmoum (une composition florale), pour le nombre d’années restées avec mon ex-mari. J’ai ensuite appris, à 35 ans, que j’avais été adoptée. J’ai alors ressenti le besoin de me faire tatouer le prénom de mes enfants. Ensuite, quand j’ai eu 37 ans, je suis allée en Tunisie pour en apprendre davantage sur mes origines, grâce à mon dossier. Je me suis fait tatouer un F calligraphique, comme mon premier prénom à l’état civil : Fatiha. Enfin, mon dernier tatouage est un dicton calligraphié en arabe, qui signifie “Si tu as la volonté, ta force sera à la mesure de ton désir”. Les tatouages ne sont pas anodins pour moi : ma grand-mère non-biologique et sa mère ont été frappées par la maladie d’Alzheimer. Si jamais je venais à perdre la mémoire un jour, j’aurai au moins des souvenirs gravés sur la peau ». Bien au-delà d’une revendication ou d’une affirmation d’identité, les tatouages représentent souvent le miroir d’une existence.
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