Vérifier une dizaine de fois sa gazinière avant de sortir, se laver les mains toutes les cinq minutes… Les TOC rendent souvent la vie de ceux qui en sont victimes difficile. Pourtant, malgré cette petite manie qui les tracasse, certains ont décidé d’assumer leur défaut et de vivre avec sereinement. Témoignages.
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Les TOC, ce sont ces pensées qui obsèdent ceux qui en sont victimes et qui les forcent à répéter plusieurs fois certains gestes du quotidien. Même si les TOC peuvent être gênants, voire handicapants, s’il s’agit d’une réelle pathologie, dans la plupart des cas, les « obsessionnels » vivent tout à fait normalement et ce trait de leur personnalité peut même ne pas être remarqué.
UN BESOIN DE TOUT CONTRÔLER
Il arrive souvent que l’origine de ces TOC remonte à l’enfance. En cherchant bien, certains arrivent à retrouver une situation qui leur a échappé ou un sentiment d’impuissance récurrent qui les a probablement conduits à développer une manie sur laquelle, en théorie, le contrôle est total. Car c’est bien de cela qu’il s’agit, la maîtrise. C’est le cas de Zahra, pour qui cette obsession pour l’ordre et la propreté est le moyen d’avoir, enfin, la mainmise sur quelque chose. « J’ai eu une enfance assez compliquée. Nous étions très pauvres et mes parents ne faisaient pas attention ; ils parlaient de leurs problèmes devant nous, sans penser que ça pouvait nous toucher. J’étais l’aînée et tout ça m’angoissait beaucoup, j’essayais de trouver des solutions et je vivais dans la peur que l’on vienne nous expulser. Plus tard, je me suis mariée avec un homme qui avait tout l’air d’un pervers narcissique. Il décidait de tout. Je crois que, comme je n’ai rien pu contrôler de ma vie, il a fallu que je trouve quelque chose que je pouvais contrôler complètement, et ça a été le ménage. Je le dis maintenant avec du recul mais, sur le coup, c’était complètement inconscient. » Du haut de ses 21 ans, Khaled est, quant à lui, incapable d’expliquer pourquoi il a besoin sans cesse de vérifier encore et encore. D’ailleurs, cette manie ne le gêne pas vraiment. « Depuis que j’ai 9 ou 10 ans, j’ai cette habitude de tout vérifier. La nuit, avant de dormir, je fais le tour de toute la maison pour voir si quelqu’un n’a pas oublié le gaz allumé ou laissé le robinet fuir. Si je sors de la maison et que je ne laisse personne derrière moi, c’est pareil, je fais le tour une fois, deux fois, trois fois. Je ne sais pas pourquoi je fais ça, mais j’ai l’impression que, juste la fois où je ne le ferai pas, il va se passer une catastrophe. Ç’a commencé comme une inquiétude et maintenant c’est un rituel. Un peu comme les joueurs de foot qui font des gestes particuliers ou qui portent toujours les mêmes crampons ; c’est ma manière de me porter bonheur. » Une manière de se porter bonheur assez contraignante toutefois. Le jeune homme avoue passer plusieurs dizaines de minutes par jour à faire ses vérifications. Et même si son obsession ne le gêne pas, le regard des autres et surtout les blagues régulières peuvent le mettre mal à l’aise.
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LE REGARD DES AUTRES
Ils sont très peu à avoir remarqué son TOC, mais la mère de Khaled le raconte volontiers à la façon d’une anecdote rigolote. Il nous explique comment.
« Moi, je ne le raconte à personne, c’est un truc normal et complètement banal pour moi. Je n’y pense même pas en fait, c’est comme ça, et c’est tout. Par contre, ma mère trouve ça drôle et surtout pratique puisque je pense à plein de choses à sa place. Quand je vérifie, je regarde toujours s’il y a du pain, par exemple, et j’en achète s’il n’y en a pas. Donc pour elle, c’est une fierté et elle le raconte à tout le monde. Honnêtement, je m’en fous mais ce sont les remarques des gens qui me prennent la tête. Dès qu’ils me voient sortir, ils me demandent si j’ai vérifié le gaz, ou alors ils laissent un robinet ouvert exprès. C’était drôle au début mais après c’est devenu saoulant et ça me met mal à l’aise. »
Inès, quant à elle, vit très bien avec sa petite manie, elle préfère en rire. La jeune femme a besoin de se laver les mains très souvent, elle a aussi beaucoup de mal à manger chez les étrangers ou à s’asseoir dans les transports en commun. Évidemment, elle est obligée de faire des petits aménagements, mais pas de quoi la tracasser plus que ça. Elle avoue qu’elle exige parfois des détours et ses amis la taquinent souvent à ce sujet mais elle prend ça avec humour, et c’est tellement plus simple. « En fait, je ne peux pas me vexer parce que, moi-même, je trouve ça drôle. Bien sûr que c’est bizarre de devoir se laver les mains toutes les trente minutes ou de demander à sa meilleure amie de bien relaver le verre avant que je puisse boire dedans mais, bon, impossible de faire autrement. Alors maintenant, chaque fois, elle me rapporte mon verre tout propre sur une assiette qui est elle-même sur un plateau comme si j’étais une princesse. Ça nous fait bien rire et ça dédramatise le truc, c’est devenu un délire entre nous. Après, il est vrai que quand je suis avec des personnes que je connais moins bien, j’ai plus de mal à sortir mon propre savon de mon sac pour pouvoir me laver les mains, donc j’utilise les gels antibactériens dans ce genre de cas. Mais je préfère mon savon, quand même ! » Pendant très longtemps, Zahra aussi pensait ne pas vraiment souffrir de son TOC mais, avec le temps, ses filles lui ont permis de prendre conscience de ce qu’elle sacrifiait pour avoir une maison toujours très propre. « Je me suis rendu compte que je passais la moitié de mon temps à faire le ménage et l’autre moitié à surveiller que personne ne salisse. Je pouvais m’énerver comme une folle pour des miettes de pain par terre… Et tout ça, pour quoi ? Pour tout recommencer le lendemain. En fait, c’est du grand n’importe quoi. Tout doucement, j’ai diminué et, maintenant, je suis presque “normale”. Je fais toujours le ménage et c’est propre chez moi, mais je n’exagère pas. Donc j’ai beaucoup de temps pour moi, je sors, je vois mes copines, je me change les idées. Je vois bien la différence entre maintenant et avant. Je ne m’en rendais pas du tout compte mais j’exagérais et je me gâchais la vie. Si j’ai réussi à changer, tout le monde peut le faire ! » Un très beau message d’espoir pour ceux qui ont du mal à se défaire de ces manies et rituels qui leur posent problème au quotidien. Pour ceux dont le réel problème n’est pas un TOC mais les remarques de leurs proches, peut-être faut-il leur faire entendre raison une bonne fois pour toutes.
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