Par jalousie, par principe ou parfois sans explications, certains hommes refusent de voir leur femme travailler. Ils affirment pouvoir s’occuper des rentrées d’argent du foyer et en font leur responsabilité à eux seuls. Face à ces hommes déterminés dans leur choix, des gazelles nous racontent comment elles ont fait face à la situation.
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A une époque où la plupart des femmes ont abandonné leur rôle de femme au foyer pour aller travailler, certaines gazelles se retrouvent obligées de renoncer à toute carrière professionnelle par amour. D’un commun accord avec leur mari ou contre leur volonté, elles ne travaillent pas. Ce mode de vie, elles ont dû d’abord l’accepter elles-mêmes avant de pouvoir l’expliquer à leur famille et leurs amies.
Assumer une décision imposée
C’est d’autant plus difficile pour ces femmes d’assumer devant leur entourage un choix qu’on leur a imposé, parfois par surprise. « Quand j’ai rencontré mon mari, je ne travaillais pas. On s’est très vite fiancés puis mariés sans jamais avoir parlé de travail. Une fois mariée, je suis restée à la maison quelques semaines puis j’ai voulu me trouver un travail. C’est là que mon mari m’a révélé qu’il ne voulait pas que je travaille. C’était évident. Il était sûr que j’étais de son avis. En fait, je n’y avais jamais pensé parce qu’il était clair pour moi que j’allais travailler. J’ai pris son “non” comme un choc. Pendant des mois, on n’a pas arrêté de se disputer. Je n’ai jamais rêvé d’une grande carrière professionnelle mais je voulais quand même avoir mon propre salaire, synonyme d’indépendance. J’ai fini par accepter de ne pas travailler quand j’ai accouché de ma fille. Elle occupait tout mon temps et j’étais contente finalement de ne rien rater de ses premières années. » Comme Malika, Ghislaine a fait un compromis et a renoncé à sa vie professionnelle mais elle a dû affronter le regard désapprobateur de sa famille et ses amies. « Au début, je n’étais pas d’accord avec mon mari. Le fait qu’il m’interdise de travailler m’a encore plus donné envie mais il a su trouver les mots et me convaincre de renoncer à mon travail. Je n’avais pas le courage de démissionner alors j’ai attendu la fin de mon contrat pour devenir femme au foyer. Mais quand je l’ai annoncé à mes parents, ils l’ont très mal pris. Ils n’ont pas du tout compris que mon mari me demande de ne plus travailler et ils ont encore moins compris que j’accepte. Depuis, les relations sont très tendues entre mon mari et ma famille… Mes copines aussi n’ont pas vraiment compris. Elles n’osent pas me le dire mais je sais bien qu’elles n’approuvent pas du tout. Mais c’est mon choix maintenant et je l’assume. »
Une princesse ne travaille pas
Mais si, pour certaines, renoncer à sa carrière professionnelle est un choix difficile à assumer, pour d’autres gazelles, c’est une évidence. Avant même d’être mariées, elles ne se voyaient pas travailler pour assumer ou participer aux besoins du foyer. Comme leurs grands-mères, elles pensent que c’est le rôle de l’homme et que la femme, elle, est bien mieux quand elle est femme au foyer. Pour Abir, c’est même un rêve de petite fille ! « Pour moi, les femmes sont des princesses et les princesses ne travaillent pas. J’aime que mon mari s’occupe de moi et subvienne à mes besoins. Je fais aussi ma part avec grand plaisir puisque je suis une vraie fée du logis et j’aime préparer de bons petits plats et des gâteaux. Je suis une femme au foyer oui, mais pas désespérée du tout ! Je vois très souvent mes copines, je vais à la salle de sport, je prends soin de moi, je lis… Je fais plein de choses et je suis loin de l’image de la femme qui passe sa journée à attendre son mari. Au contraire, j’ai des journées plutôt chargées mais c’est cool parce que j’ai le temps de faire ce que j’aime. Je pense que mon mari et moi, on a eu beaucoup de chance de tomber l’un sur l’autre. Lui ne voulait absolument pas d’une femme qui travaille, il tenait à subvenir lui-même aux besoins de sa famille et il est aussi jaloux donc les relations avec les collègues de travail l’auraient dérangé. Je le comprends puisque je suis aussi jalouse que lui ! Je crois qu’on était vraiment fait l’un pour l’autre. » L’harmonie semble ainsi bien plus facile à trouver quand la décision correspond aux désirs de chacun. Et parfois, elle apparaît comme une évidence alors que l’on ne s’y attendait pas. Nabila n’est pas du genre à rester à la maison et, malgré les pressions de son mari, elle a continué à travailler pendant des années avant de complètement changer d’avis ! « Avant que l’on se marie, j’ai bien précisé à mon mari que je voulais travailler. J’avais fait des études et je n’avais pas envie de tout gâcher. Il a accepté à contrecœur. Dès la naissance de notre fils, il a remis le sujet sur la table parce qu’il voulait que je reste à la maison pour m’occuper de lui. J’ai résisté. J’ai pris un long congé maternité mais je suis retournée travailler. Quand notre deuxième fils est né, il est revenu à la charge et je n’ai pas craqué. Rebelote pour le troisième mais j’ai la tête dure, donc je n’ai pas arrêté le travail. Cela fait seize ans que nous sommes mariés et, il y a quelques mois, j’ai décidé d’arrêter le travail. Mes enfants grandissent et ils ont de plus en plus besoin de moi. Ce sont des adolescents et je crains que mon absence leur cause du tort. On ne va pas se mentir, travailler 35 heures par semaine, s’occuper de la maison et de ses enfants, c’est très compliqué même avec l’aide de son mari. »
Un équilibre à trouver
Une fois la décision prise, reste à s’adapter sans sombrer dans la routine. Pour Nabila, ce nouveau mode de vie a été une révélation. « Je regrette presque de ne pas avoir arrêté avant. J’ai beaucoup moins de pression sur les épaules et j’ai allégé celle de mon mari en m’occupant de la maison, des enfants et de l’administratif. C’est beaucoup plus simple comme ça finalement. Je suis bien plus épanouie. » Même son de cloche pour Abir qui est « très heureuse avec ce statut de femme au foyer et ne se voit pas vivre autrement ». Pour Ghislaine en revanche, tout n’est pas tout rose. « Je crois que je n’ai pas encore trouvé mon rythme. J’ai des hauts et des bas, des périodes où tout va pour le mieux et d’autres où j’ai l’impression de tourner en rond. Je sais que c’est pareil pour tout le monde mais c’est encore plus compliqué quand on est femme au foyer. J’ai beau m’occuper, ce n’est pas toujours facile de faire tous les jours la même chose, d’être seule à la maison et de n’avoir rien à raconter à son mari à la fin de la journée. J’ai l’impression d’être inutile. Je me dis que je devrais faire quelque chose mais finalement quand on a trop de temps à disposition, on n’a le temps de rien… » Malika, elle, a trouvé son épanouissement auprès de sa fille. « Elle me prend tout mon temps et je suis très heureuse de passer autant de moments avec elle. C’est bizarre, je n’aurais jamais cru pouvoir trouver mon bonheur en restant à la maison. Et maintenant qu’elle a grandi, je peux m’accorder plus de temps pour moi, pour apprendre l’arabe. J’ai toujours voulu maîtriser cette langue ; maintenant, j’ai le temps pour le faire. D’ailleurs, j’ai le temps de faire plein de choses. J’ai presque envie de dire merci à mon mari. Presque ! »
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