Carrière professionnelle, envie d’épanouissement par d’autres biais, besoin de se sentir libre, fin de vie féconde ou manque d’envie, tout simplement… Les raisons sont multiples pour expliquer le souhait de ne pas avoir d’enfants. Certains couples n’en souhaitent pas, même s’ils semblent « tout avoir » pour que ce soit le cas, et cette décision ne fait pas toujours plaisir à leur entourage. Ils témoignent.
Selon une enquête de 2014 de l’Institut national d’études démographiques (l’INED), 5 % des Français(es) choisissent de ne pas avoir d’enfant. De nos jours, déclarer publiquement ne pas vouloir procréer reste assez rare. Pourtant, il existe des couples qui ne le souhaitent pas. Ils préfèrent se consacrer pleinement à leur relation de couple, ont d’autres projets de vie ou favorisent parfois leur carrière. Ces choix trouvent parfois aussi leur origine dans une enfance difficile, un contexte social ou politique compliqué, un fort besoin d’indépendance. D’ailleurs, ils assument très souvent ce choix, même s’ils sont trop souvent perçus comme des personnes égoïstes. En effet, les proches, et souvent les parents, n’acceptent pas cette décision, qu’ils vivent comme une punition : un peu comme si leurs enfants les pénalisaient en les empêchant de devenir grands-parents. Ces mêmes parents pensent d’ailleurs que leurs enfants changeront certainement d’avis un jour. Ils sont alors bien déçus lorsqu’ils comprennent que ce n’est pas toujours le cas.
Je ne veux pas être maman, mais rester femme avant tout
Certaines n’ont pas de désir maternel, car cela signifierait selon elles de devoir sacrifier leur vie de femmes indépendantes et accomplies. Khedidja, 36 ans, n’envisage pas d’avoir d’enfant afin de préserver, comme elle le dit : « ses atouts physiques ». « Je ne veux pas gâcher mon corps, ma beauté. Même si je suis consciente de ne pas pouvoir les garder toute ma vie, je ne souhaite pas vieillir avant l’âge. Prendre du poids, voir mon corps se déformer, c’est hors de question, aussi bien pour mon mari que pour moi ! Nous avons la même vision des choses. Cela peut paraître égoïste, mais nous nous sommes mis d’accord dès le départ sur ce point. Je veux toujours pouvoir être séduisante. En fait, je fais très attention à mon corps. Je ne veux surtout pas prendre du ventre, des cuisses, me laisser aller comme un bon nombre de mamans. Sans vouloir être méchante, après l’accouchement, la plupart des femmes se négligent. Elles ne prennent plus soin d’elles. Elles n’ont plus de temps pour faire du shopping, pour s’habiller, aller chez le coiffeur, rester belles. Lorsqu’elles ne travaillent pas, tout leur temps est consacré à leurs enfants. Elles ne pensent plus à elles et se noient dans une profonde tristesse. La plupart n’envisagent même plus de sortir entre amis ou avec leur mari tant leurs petits prennent de la place dans leur existence. Mon homme et moi ne souhaitions pas nous infliger cela. D’ailleurs, pourquoi faire un enfant uniquement pour correspondre à la norme sociale ? Ce ne serait pas juste d’en avoir seulement pour faire comme tout le monde et risquer de rendre des enfants malheureux. Je ne sais pas si nous le regretterons un jour, car nous sommes honnêtes avec nous-mêmes. Certains me diront que j’ai déjà vécu ma jeunesse et qu’il serait temps que je laisse les plus jeunes la vivre à leur tour, mais non, je ne suis pas d’accord, pour moi la jeunesse est dans la tête », confie la jeune femme.
Nous tenons à nos carrières professionnelles
Pour certains couples, c’est l’ambition professionnelle qui prend le dessus. Yamina, 26 ans, et son compagnon se sont promis de ne pas en avoir et ce même avant de se marier, il y a trois ans. « J’ai envie de pouvoir trouver un travail sans que la question des enfants ne soit un frein à mon évolution. Souvent, lorsqu’on a des enfants, la carrière stagne. Ce n’est pas non plus facile de pouvoir allier vie professionnelle et vie familiale. Il faut aussi pouvoir trouver le mode de garde adéquat. En fait, avoir un enfant implique le fait que tout gravite autour de lui. À un moment donné, il faut faire un choix, un choix difficile, certes, mais primordial. Nous désirons pouvoir continuer à voyager, à aller au cinéma, à apprécier la vie. Avec un enfant, surtout les premières années, ce n’est pas possible. Beaucoup nous disent que nous sommes jeunes et que nous changerons certainement d’avis au fil du temps. Cependant, je sais que ce ne sera pas le cas. Avoir des enfants qui courent partout dans la maison, qui cassent tout, qui crient ; devoir se lever la nuit, les accompagner à l’école, veiller à ce qu’ils ne manquent de rien : éduquer une personne, ce n’est pas rien, cela demande pas mal de temps, d’investissement, de patience… En plus, nous nous imaginons mal devoir écourter le temps passé avec ce bout’chou que nous aurions mis au monde. La culpabilité, très peu pour nous ! Vivre avec cela contribuerait sûrement à mettre en échec notre vie de couple. Nos parents essaient de nous dissuader. Ils ne seront pas grands-parents avec nous, mais ils le sont déjà grâce à nos frères et sœurs. Nous pensons qu’avoir des enfants, ce n’est pas forcément un accomplissement, c’est un peu à double tranchant. Ils peuvent aussi bien nous rendre heureux que pas du tout. Nous ne voulons surtout pas percevoir notre enfant comme un fardeau. Ce serait vraiment triste », explique la jeune femme.
Nous avons peur du monde dans lequel grandiront nos enfants
Avoir des enfants soulève bon nombre de questions chez beaucoup de couples. Aussi, avant de se lancer, certains se demandent dans quel monde vivront leurs chers bambins. Plus les années passent, plus Lilia, 33 ans, est convaincue qu’avoir un enfant en ces temps troublés serait synonyme de souffrance, en particulier pour lui. « Cette conviction s’est amplifiée avec le temps et surtout avec la pollution accrue, les effets du réchauffement climatique, la décadence, la folie meurtrière humaine et maintenant les pandémies. Pour nous, il s’agit donc d’un choix éthique, car il y a déjà pas mal d’enfants qui n’ont pas de parents, par exemple. Notre décision prend également en compte l’idée que les ressources sont insuffisantes sur Terre. L’avenir est si incertain. D’ailleurs, cette crise sanitaire n’annonce rien de bon non plus. Je n’ai absolument pas envie de mettre un enfant au monde avec tout ce qu’il se passe. Quelle vie aura-t-il ? S’en sortira-t-il, et à quel prix ? Si nous avons vécu durant notre enfance et notre jeunesse des bons moments, ce n’est pas sûr que cela soit le cas pour eux. Le monde se dégrade et, selon moi, un enfant n’y a pas sa place. Certains vont me traiter de rabat-joie. Tant pis, je suis réaliste ! Je devrais dire que nous sommes réalistes, mon mari et moi. Nous en avons pas mal discuté et nous sommes arrivés à la conclusion qu’il ne serait pas sage, à l’heure actuelle, d’avoir des enfants. Cette décision a été difficile à prendre et paraît inconcevable aux yeux de notre entourage, surtout de nos parents respectifs. Au départ, mon mari et moi en parlions sur le ton de la rigolade. Souvent, il me disait : « Ces gamins sont bien trop bruyants ! ». Il trouvait aussi que les enfants d’aujourd’hui sont difficiles à gérer, qu’ils commettent facilement de graves délits… Peu à peu, lorsqu’il a vu que je partageais le même point de vue, il était plus à l’aise et m’a parlé plus ouvertement de ses réticences. J’étais d’accord sur toute la ligne », précise la jeune femme.