Perdre sa langue maternelle, comment c’est possible ? C’est notamment grâce à celle-ci que la vision du monde, subjective et singulière, se construit et c’est celle qui, un peu comme le vélo, une fois apprise, est inscrite dans la mémoire de façon indélébile. Selon l’expertise des linguistes de Babbel un des leaders européens pour l’apprentissage des langues en ligne : il est bel et bien possible de perdre sa langue maternelle.
C’est un phénomène peu connu mais néanmoins assez commun. Il se manifeste lorsqu’une deuxième langue devient dominante dans le cerveau. Par exemple, les personnes ayant un contact limité avec leur langue d’origine, notamment les émigrés de longue date, ou encore celles étudiant une nouvelle langue tardivement (à partir de 6 ou 7 ans, mais surtout à l’adolescence et l’âge adulte), partagent cette expérience. La perte de la langue maternelle peut avoir diverses origines dans la mémoire, ainsi que des causes externes multiples (neurologiques, sociologiques, psycholinguistiques…).
Si les traces de la langue maternelle ne s’effacent jamais complètement (du moins chez les bilingues tardifs), la coexistence de deux langues exige toutefois un effort cognitif accru. Dans le deuxième cas, chez un bilingue (ou multilingue) tardif, plusieurs systèmes linguistiques interagissent dans le cerveau.
Posséder deux langues, c’est aussi les mettre en concurrence
En effet, lors de l’apprentissage d’une nouvelle langue, la maternelle permet le transfert de connaissances : au départ, avec la traduction mentale du vocabulaire, puis l’utilisation des structures grammaticales familières. Même s’il s’agit d’un langage radicalement différent du sien, la première langue joue le rôle de repère – ne serait-ce que pour mieux s’en éloigner. Petit à petit, le deuxième système linguistique fait son nid dans le cerveau et devient indépendant. Le recours se fait de façon plus directe, sans nécessairement passer par le premier. Ainsi, selon la fréquence à laquelle il est activé, l’un des deux systèmes linguistiques peut devenir dominant tandis que l’autre s’enfouit plus profondément dans la mémoire.
« La langue, c’est l’âme et l’esprit des choses. » Haviva Pedaya
La langue étant investie d’une forte charge émotionnelle, en apprendre une nouvelle pour des raisons personnelles ou intimes, peut renverser la hiérarchie naturelle entre langue primaire et secondaire ; par exemple si elle est apprise par amour, ou encore afin de renouer avec ses racines.