Votre enfant déteste aller en cours ? Il cumule les mauvaises notes ? Il est atteint de phobie scolaire ? On vous dit ce que cela peut cacher, et comment l’aider !
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Hasna, 10 ans, CM2
« Le matin, quand je vais à l’école, souvent j’ai très mal au ventre. J’ai si peur de ne pas comprendre ce que la maîtresse nous dit, et donc d’avoir de mauvaises notes, que je ne pense qu’à ça. Mes parents et ma grand-mère ont tristes, je ne veux pas les décevoir. Je me sens vraiment angoissée quand j’entre dans la classe ! Je préfèrerais rester à la maison… Il m’arrive même d’en faire des cauchemars. Je ne dis rien à mes parents, mais parfois je pleure toute seule dans ma chambre à l’idée d’y retourner. Mon carnet de notes est correct, et je sais que j’ai tort de m’en faire comme ça, mais je ne peux pas m’en empêcher. Et puis, cette année, je n’aime pas la maîtresse, je trouve trop sévère… »
Dounia, 13 ans, cinquième
« Aller en cours est une corvée. Je déteste. Les profs, les surveillants, même combat. Ils nous méprisent complètement. Les devoirs à la maison, c’est pareil : je hais ! D’ailleurs, je les fais rarement. Mes résultats sont mauvais, mais si vous savez comme je m’en fiche… De toute façon, je ne veux pas faire d’études. Je veux être assistante maternelle. Alors bac ou pas, quelle importance ? Mes parents me poussent à bosser, ils sont tout le temps sur mon dos. Je les laisse parler. Après tout, c’est moi que ça concerne. Et moi, m’ennuyer pendant des heures dans une salle de classe, non merci ! Ça me prend la tête, tout ça. Dès que possible, j’arrête ! »
Professeur en collège et en lycée mais aussi psychologue, Nathalie Anton a enseigné pendant douze ans en France. Elle exerce désormais au lycée français de New York. À l’occasion de la sortie de son livre, Non, votre ado n’est pas feignant *, elle a accepté de répondre à nos questions. Ou comment expliquer les difficultés scolaires de nos enfants et essayer d’y résoudre…
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Prenons le cas de Dounia (voir témoignage ci-contre). Face à sa rébellion, que doit-il faire ?
Il ne faut pas s’arrêter à l’explication simpliste de la « crise » d’adolescence – qui, en réalité, n’explique rien ! –, mais dépasser la colère car elle dissimule souvent d’autres états : de l’inquiétude, de la fragilité, la peur d’être mal-aimé(e), abandonné(e), ou encore d’échouer, de décevoir …
Comment réagir dans ce genre de cas ?
Les éducateurs ne doivent pas prendre cette colère au premier degré mais comprendre que c’est souvent d’encouragements, de reconnaissance, de réassurance que ces ados ont besoin ! Face à ces attitudes qui tendent à tester la solidité des adultes, il est important de resserrer les liens entre l’école, la famille et les partenaires extérieurs – le coach sportif, le conseiller d’orientation, l’assistant social, le médecin, le psychologue… – pour que l’adolescent se sente soutenu, et qu’il puisse trouver au moins une personne en qui il aura confiance. Le fait même de dire à un jeune en difficulté « Je m’inquiète pour toi, j’aimerais que tu réussisses et je veux t’aider », au lieu de « Tu es un bon à rien, c’est ta faute si tu en es là ! » permet plus d’ouvrir le dialogue.
Autre cas, celui d’Hasna qui semble être en proie à la phobie scolaire…
Là encore, il faut comprendre ce qui la bloque à ce point, car le terme de « phobie scolaire » regroupe des situations à chaque fois uniques. Cela peut venir, par exemple, d’exigences scolaires – anxiété à l’idée de perdre ses repères à l’entrée en CP ou en 6e, crainte d’échouer aux évaluations, surcharge de travail entraînant un stress intense… –, ou bien de problèmes relationnels – peur d’un enseignant, conflits avec d’autres élèves, harcèlement scolaire… Mais l’école n’est parfois que le lieu sur lequel se cristallisent d’autres angoisses. Comme la peur qu’il arrive quelque chose à ses parents quand il ou elle n’est pas là, ou des soucis importants – deuil, conflits familiaux, etc. – qui l’empêchent d’avoir l’esprit libre. Voir, évidemment, des troubles psychologiques plus profonds qu’il convient de diagnostiquer et de prendre en charge.
Concrètement, comment aider ces enfants ?
Dans certains cas, un discours ferme et rassurant des éducateurs – parents et enseignants –, avec un accompagnement plus fin sur le plan scolaire et relationnel, peut suffire à surmonter l’anxiété. Mais si elle devient trop envahissante, il est indispensable de consulter un pédopsychiatre pour mettre en place un suivi adapté. Impliquer l’école est primordiale, d’autant que des aménagements d’emploi du temps peuvent être envisageables.
Quand faut-il commencer à s’inquiéter ?
Le plus tôt possible ! Plus les symptômes sont pris en charge rapidement, et moins ce refus scolaire a des chances de s’installer durablement. Les maux de tête ou de ventre, les nausées, les difficultés à dormir doivent éveiller l’attention. Les conduites d’évitement – comme les passages à l’infirmerie ou les absences en cours – sont à interroger. Enfin, bien sûr, la baisse des résultats scolaires, l’absence suspecte de notes ou le manque de soin dans la tenue des cours qui ont souvent été choisies ne va pas.
Le redoublement peut-il être une solution ?
Depuis 2015, l’Éducation nationale le limite à deux cas : lorsque l’élève a subi une absence prolongée n’ayant pas permis l’acquisition des études ouvertes en France comme à l’étranger déclaré qu’il peut se révéler inutile, voire condamnable pour la scolarité de l’enfant ou de l’adolescent.
Pourquoi ? Pour que ce soit bénéfique, il faut que les conditions d’enseignement changent et soient mieux adaptées au profil de l’élève : une répétition dans le même cadre et au même rythme risque de produire les mêmes effets. D’autre part, lorsque l’élève ne perçoit pas son redoublement comme une deuxième chance, il développe un sentiment d’échec associé à une perte de motivation et de confiance en lui. Voir en ses parents ou en l’école.
Et l’école à la maison ? Est-ce un remède miracle ?
Les remèdes miracles n’existent malheureusement pas… Il faut se méfier des solutions simples. Certes, dans les cas de troubles dépressifs ou anxieux sévères, un retrait de l’école peut être prescrit par le médecin. Cependant, il ne faut pas oublier que c’est un lieu de socialisation et d’accès à l’autonomie. Cette solution risque donc de l’isoler. De plus, les enseignants ont recours à différentes approches pédagogiques que les parents ne maîtrisent pas. Lorsque l’on connaît les tensions que déclenchent les devoirs à la maison, imaginez les étincelles autour de la table s’ils endossent le rôle de professeur ! Enfin, il me semble important que d’autres adultes aient un regard sur l’enfant, car ils peuvent décélérer des potentialités ou des difficultés que les parents ne voient pas ou plus.
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